Les équipes de BNP Paribas Real Estate ont organisé le jeudi 26 janvier dernier « les rencontres 2023 du marché de l’investissement de bureaux ». Olivier Ambrosiali, Directeur Général Adjoint Transaction France, Richard Malle, Deputy Head of Business Services (Research, Data, Innovation) et Brice de Germay, Directeur Capital Markets Bureaux Île-de France ont analysé durant cette conférence les chiffres du marché de l’investissement en immobilier d’entreprise en 2022 et nous ont fait part de leurs perspectives pour 2023.

Une année 2022 contrastée pour l’investissement en immobilier d’entreprise en Europe

Le bureau représente la plus grosse part des investissements

 

Un démarrage tonitruant, une décélération progressive, des rebondissements en cascade jusqu’au coup de frein brutal en fin de saison … le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise a été l’an passé digne du scénario d’une telenovela ! 2022 a en effet été « une année très particulière pour l’investissement en immobilier d’entreprise en Europe, voire même une première dans l’histoire de ce marché », selon les mots d’Olivier Ambrosiali, Directeur Général Adjoint Transaction France. 

Alors que les volumes d’investissement avaient commencé l’année en trombe en renouant, et même, surpassant leurs niveaux pré-Covid au premier trimestre (+46% d’investissement en comparaison avec le T1 2021), les principaux marchés ont commencé à ralentir au second semestre, impactés par les incertitudes géopolitiques et économiques croissantes. Les volumes investis ont surtout drastiquement chuté au quatrième trimestre avec une baisse de -58% par rapport au T4 2021, faisant terminant l’année 2022 sur un chiffre de 247 Mds € investis en Europe contre 289 Mds € en 2021, la moyenne sur 5 ans se situant quant à elle à 268 Mds €. Cette baisse des volumes investis en immobilier d’entreprise en Europe est autant dû au retrait des investisseurs domestiques (-20% par rapport à 2021) qu’à celui des internationaux : Moyen-Orient et Europe en tête mais également celui de l’Amérique du Nord. Seuls les investisseurs Asie-Pacifique ont augmenté leur exposition, en se concentrant principalement sur le marché britannique. 

Actif très largement favori des investisseurs européens depuis de nombreuses années, le bureau, bien qu’en recul, continue de séduire et reste en tête de la part des investissements globaux en immobilier d’entreprise en 2022. Il représente 49% des volumes en France, 51% en Allemagne et 44% au Royaume Uni. Même s’il accuse une légère baisse en France et au Royaume-Uni, l’investissement industriel et logistique occupe la deuxième place du podium des investissements. Et la médaille de bronze revient donc aux commerces, dont la part progresse fortement en France et en Allemagne, profitant d’un effet diversification et des taux de rendements plus attractifs.   

En ce qui concerne les taux de rendement prime, tous les marchés de l’investissement de bureaux en Europe enregistrent une remontée des taux depuis le début de l’année et sont tous désormais égaux ou supérieur à 3%, car impactés par la hausse des taux obligataires d’état et du coût du financement.

Le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise Français tire son épingle du jeu !

Les régions résistent mieux que les bureaux franciliens

 

Al contrario de la moyenne européenne, le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise en France a su se démarquer et s’affiche en hausse de 1% en 2022 par rapport à 2021, avec 28,1 Mds € investis, malgré un quatrième trimestre qui a marqué un coup de frein brutal aux investissements comme chez ses voisins européens : pas moins de 54% de baisse au T4 par rapport à la moyenne des 5 dernières années ! Une chute libre qui peut s’expliquer par le retrait massif d’opérations et par des hausses successives des indicateurs obligataires et financiers. 

En termes d’investissement selon la typologie des actifs, la logistique et l’activité ont continué de surperformer en 2022. Les services sont quant à eux dopés par les résidences gérées et l’hôtellerie de loisirs, bénéficiant du retour des touristes dans l’Hexagone. Enfin, après 2 années atones, le marché du commerce affiche de belles couleurs, en forte hausse, car boosté par quelques transactions majeures.

En revanche, le net recul de la part du bureau dans les volumes d’investissement demeure un des faits le plus notables de l’année 2022, passant de 59% en 2021 contre donc 49% en 2022. Il est cependant nécessaire pour analyser la chose de manière la plus fine possible de distinguer le marché des bureaux franciliens et le marché de bureaux en régions, les tendances étant très différentes entre ces 2 marchés.

En régions, les volumes investis sont en hausse de 12% par rapport à 2021, et même supérieurs à la moyenne 5 ans, profitant d’un plus grand appétit des SCPI pour des actifs de moindre taille et de meilleur rendement dans ces territoires. Al contrario, en Île-de-France, le volume investi accuse une forte baisse de -21% et le chiffre demeure largement inférieur à sa moyenne décennale, car en partie pénalisé par le repricing et le manque de liquidité pour les grandes transactions. 

En matière de taux, 2022 a été l’année de l’atterrissage en douceur pour les classes d’actifs bureaux et logistiques. Après plus de 10 ans de baisse, l’an passé marque la remontée des taux de rendement « prime » en ligne avec celle de l’OAT. L’augmentation est plus marquée en logistique qu’en bureaux, tandis qu’en commerce, faute de transactions majeures en centre-ville, le taux de rendement reste stable.
 

Le comportement des acquéreurs a changé de manière radicale en 2022, et ce qui nous semblait évident, voir inscrit dans le marbre pour le marché, s’est totalement enrayé. Cependant, l’inertie du marché Français et la diversification des classes d’actifs nous permettent de terminer l’année avec un volume d’investissement stable. 

Olivier Ambrosiali
Olivier Ambrosiali, Directeur Général Adjoint Transaction France
BNP Paribas Real Estate

Focus sur l’investissement dans le marché du bureau francilien

3ème année de recul consécutif pour cet actif

 

Avec seulement 10,5 Mds € investis en 2022, le marché de l’investissement de bureaux en Ile-de-France recule pour la 3ème année consécutive, en baisse d’environ 20 % par rapport 2021, mais surtout de 35 % en-dessous de sa moyenne décennale qui s’établit à 15,8 Mds €.

Comme pour l’ensemble du marché de l’investissement Européen tous actifs confondus, c’est encore et toujours le 4ème trimestre qui affiche la plus forte baisse et subit la variation la plus forte : 2,1 Mds € pour un 4ème trimestre, c’est de loin le montant le plus faible investi en bureaux franciliens depuis plus de 10 ans pour un 4ème trimestre ! Ce montant représente à peine 20 % du volume de l’année 2022 pour un trimestre qui habituellement englobe à lui tout seul plutôt 40 à 50 % du volume total de l’année ! « Tout simplement du jamais vu depuis la crise financière de 2008 », analyse Brice de Germay, Directeur Capital Markets Bureaux Île-de France.

L’investissement en bureaux franciliens est donc à la peine en 2022, ce qui pourrait s’expliquer par la proportion assez impressionnante d’actifs retirés du marché l’an passé : près de 6,2 Mds € de biens enlevés entre mai et décembre 2022 ! À cela s’ajoute un volume additionnel composé de off-market abandonnés ou d’opérations qui n’ont même pas trouvé les conditions d’une liquidité suffisante pour être présentés.

Parmi ces actifs retirés du marché en cours d’année, les grandes opérations sont surreprésentées puisque les biens supérieurs à 100 M€ représentent 87 % du volume retiré. Plus surprenant, les actifs Core représentent 64% du volume global retiré, tandis que les actifs Parisiens pèsent pour près de la moitié (46%) de celui-ci. Et si on lie les deux données, le résultat est encore plus surprenant car près de 70% des volumes retirés dans Paris sont des actifs Core. 
 

Le taux prime en Île-de-France basé uniquement sur les deals négociés puis signés après le mois de juin 2022, voire même de deals encore en cours de discussion ou très récemment mis sous promesse, marque une relative décompression. Les fourchettes de taux relevées font écho au retournement du marché et au manque de références constatées. Ainsi, sur les marchés de périphérie, BNP Paribas Real Estate estime que les taux prime se situent dans les fourchettes suivantes :

  • Taux prime 1ère couronne ouest 4,25-4,50 (50-75 bps)
  • Taux prime 1ère couronne sud, nord-est, ou à La Défense 4,50-4,75 (70-90 bps)
  • Taux prime 2ème couronne 5,75-6,00 % (85-110 bps)

 

Pour les plus petites opérations parisiennes QCA, le taux prime se maintient dans une fourchette proche des 3 à 3,25 % pour monter jusqu’à 3,50 % pour les opérations de 150 à 300 M€ tandis que les sujets de tailles supérieures se traiteraient 3,75 % ou plus.

Quelles perspectives pour le marché de l’investissement en 2023 ?

Indexation des loyers en hausse, prime de risque s'équilibre

 

Le Département Research de BNP Paribas Real Estate anticipe en 2023 une hausse des revenus locatifs grâce à l’indexation des loyers. Selon Richard Malle, l’ILAT (Indice des loyers des Activités Tertiaires) dont le prochain indice sera révisé en mars 2023, devrait enregistrer cette année, comme en 2022, des évolutions annuelles autour de 5 à 6 %. Pour la suite, l’ILAT est encore attendu avec une croissance assez significative à partir de 2024, supérieure à l’inflation de par sa méthode de construction, autour de 3 % en moyenne. « Sur les dix prochaines années, on projette désormais une croissance moyenne annuelle de l’ILAT à 2,5 %, alors qu’on prévoyait seulement 1 % avant le choc de 2022 », explique Richard Malle, Deputy Head of Business Services (Research, Data, Innovation).

Par ailleurs, sous l’hypothèse d’un rendement de l’OAT 10 ans proche de 2,5 % d’ici à 2024 comme l’anticipe le département Research, une tension du taux « prime » dans Paris QCA (Quartier Central des Affaires) à 3,5 % serait suffisante pour retrouver une prime de risque à l’équilibre. Si ce taux cible de 3,5 % est une moyenne, il sera certainement plus élevé pour des actifs à montants élevés (> 300 M€), tandis qu’il pourrait être plus faible pour des actifs à montants plus limités (< 150 M€). « Les points d’équilibre de taux devraient être ainsi vite atteints courant 2023, et ce pour la plupart des marchés « prime » et « Core ». En revanche, pour les actifs présentant des faiblesses ou pour les marchés en difficultés, les corrections seront plus fortes et pourraient se prolonger dans le temps. », analyse Richard Malle.

Concernant le marché utilisateurs, l’effet rattrapage post-Covid après la chute historique des locations en 2020 devrait s’estomper en lien avec le ralentissement de la conjoncture économique. Mais des moteurs continueront de soutenir la demande placée en bureaux en 2023 voire au-delà, à savoir les nouveaux modes de travail, la recherche de centralité et bien sûr la prise en compte des critères environnementaux et de performance énergétique des immeubles. Dans cette optique, le Département Research BNP Paribas Real Estate table sur une demande placée des bureaux franciliens juste au-dessus des 2 millions de m² cette année, soit non loin des niveaux atteints en 2022 (2,1 millions de m²).

Pour les années à venir, et ce même en anticipant une amélioration de la croissance économique, il paraît difficile de dépasser les 2/2,2 millions de m² de contrairement aux cycles passés. La demande restera certainement plus compacte en termes de surface et plus exigeante en termes localisation et de qualité. Tout cela implique donc une accentuation des phénomènes de marché à deux vitesses. 

Richard Malle
Richard Malle, Deputy Head of Business Services (Research, Data, Innovation)
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